Sois forte

Depuis quelques jours, son téléphone ne cesse de sonner, ses proches sont très soucieux pour elle et ... pour l'encourager, ils lui disent : sois forte. Ce ne sont pas vraiment les mots qu'elle voudrait entendre. Pour une fois dans sa vie, elle aimerait pouvoir leur dire qu'elle a la chienne, qu'elle a peur, que cela lui remue les entrailles. L'aventure qui s'annonce n'a rien de folichon, l'issue pouvant être la mort. Une leucémie aigüe... du jamais vu.
 
À 52 ans, ma bonne fée ne baissera pas les bras, ce n'est pas dans sa nature, mais pour une fois dans sa vie, elle devient sa priorité. Tout a commencé par ce voyage en France et en Grèce où elle avait convaincu son homme de cœur depuis plus de 30 ans à faire la grande traversée. De par les réseaux sociaux nous étions plusieurs à être du voyage. Le ciel bleu de la Grèce, difficile d'y résister. Puis  une mauvaise grippe, le retour au pays, toujours la toux et des ganglions qui s'animent comme une guirlande de Noël. Cela fait mal.
 
L'ironie dans tout cela, ma bonne fée occupe un poste- cadre au Ministère de la Santé.  Vous vous dites qu'elle est entre bonnes mains. Oui... mais l'homme n'est pas infaillible. Le diagnostic est difficile à poser. Ma bonne fée a confiance. Un jour c'est un lymphome, un autre jour peut-être la maladie de Lyme. Pendant ce temps, les ganglions se font vicieux, enflent à vue d'œil, réduisant sa mobilité au niveau du cou.
 
Elle profite de la vie en attendant le verdict officiel. Il tombe, lui faisant craindre le pire. Le pire c'est quelques jours pour se préparer à vivre isolée, à recevoir  la chimio et si elle répond bien au traitement, il faudra envisager la greffe de moelle osseuse. La route est longue. Ma bonne fée doute d'y arriver. Alors, le sois forte, elle s'en fout. Elle le sait qu'elle est forte. Notre nature première ne s'évanouit pas de par les épreuves.
 
Elle aimerait que l'on accueille sa colère, celle d'être aux prises avec une maladie qui met sa vie entre parenthèses et de ce système qui prend du temps à agir. Elle a peur de voir sa vie s'étioler comme celle de sa mère aux soins palliatifs.  Elle voulait tondre sa tignasse pour s'éviter la déchéance de la perte de ses cheveux, elle s'est ravisée.
 
Aujourd'hui, débute son périple au pays des globules blancs qui s'affolent. Dans sa cage qui n'a rien de doré, elle aura besoin d'être écoutée et accueillie, de se faire dire qu'elle est aimée, de recevoir des attentions, elle qui en a eu pour tant d'autres. En panne d'idée,  si vous vous présentez avec un Dry Martini bien frappé, sourire assuré.
 
Je t'aime ma bonne fée !

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