Le sens

Avoir du sens

Dernier repas à notre restaurant habituel. Le proprio nous offre le vin. Elle m'interroge sur la réaction du personnel à l'annonce de son départ. Leur tête comprend mais leur coeur est triste, le mien aussi. Elle veut donner un nouveau sens à sa vie. La perte de son fils, les désillusions quant à ses perspectives de carrière à l'intérieur de notre organisation, l'ont menée vers un retour aux sources. Elle a obtenu un poste de direction dans un domaine de formation qui lui est connu: agriculture. De plus, le centre où elle évoluera offre le programme acériculture. Son fils décédé, était propriétaire d'une érablière. Cela a du sens.  Il y a de cela trois ans, elle s'était présentée à l'entrevue. Sans doute l'entrevue la plus courte que j'ai vue. Sa feuille de route était impressionnante et j'ai eu confiance qu'elle pourrait relever le défi qui l'attendait. Je ne m'étais point trompée. Trois ans à faire équipe, à bâtir ensemble. Notre complicité va me manquer.

Cela n'a pas de bon sens

La lèpre des temps modernes frappe sans discernement. Chaque semaine j'apprends qu'un tel à la veille de sa retraite est décédé. Pourtant, il avait de bonnes habitudes de vie. Cette semaine, c'est notre directeur des ressources matérielles dont on nous a annoncé l'échéance de vie : deux semaines. Il y a un mois, il n'en savait rien. Un choc. Idem pour notre présidente du conseil des élèves. Deux membres de mon personnel sont aussi affectés par le cancer, pour bien le nommer. J'ai un employé dont la femme a une tumeur derrière le nez, inopérable aux dires des médecins. La douleur, pour ne pas dire le calvaire qu'elle endure. Et lui, il assiste impuissant à cette dégringolade. Non, cela n'a pas de bon sens. Tout comme vous, je cherche une explication. Je songe à David Servan-Schreiber qui dans son dernier livre: On peut se dire au revoir plusieurs fois explique sa récidive de cancer par le surmenage. Je crois que cette hécatombe résulte de notre incapacité à poser nos limites, à nous respecter. Dire non, nous fait parfois mal paraître mais il faut savoir se choisir. En ce qui me concerne, c'est un travail quotidien. Je préfère regarder droit devant, ne pas me laisser happer par les affres de la vie, c'est une question de survie.

Donner du sens

Quand j'étais jeune, je voulais tout connaître, tout essayer. Ma mère avait souvent pour commentaire que je débutais plusieurs choses sans les terminer. C'était vrai en partie. La création est un processus où il y a un début et où la fin est indéterminée. J'ai débuté des peintures pour les terminer cinq années plus tard. La même chose pour des livres. Je suis une boulimique de l'apprentissage qui s'assume. Ce qui donne du sens à ma vie, à mes actions, c'est de pouvoir faire la différence pour quelqu'un. Un geste, une parole, une attention. Tout cela pour vous dire, qu'il y a plus de 15 ans, j'avais pour projet de transmettre mon expertise en France. D'ici quelques jours, je réaliserai ce projet. Ce que la vie m'a appris, c'est de persévérer. En fait, c'est plutôt ma mère qui m'a appris cela. J'ai si bien appris ma leçon que je l'ai transmise à mes garçons. Dimanche, j'assisterai à la collation des grades de mon aîné. Un grand moment de fierté à partager que j'ai bien failli manquer par mon étourderie.  Ce qui donne du sens à ma vie ce sont ces projets, ma famille, mes amis, les gens qui croisent ma route. Et vous ?

Commentaires

  1. Très chère Gigi, ma belle amie. Je suis émue, sans mot,ça n'a pas de sens.....J'ai cependant une suggestion, pourquoi ne pas penser dès maintenant à publier ce que tu écris, pas tout de suite mais à ta retraite! N'est-ce pas que ça donnerait aussi du sens à ta vie à ce moment-là! Magnifique ce texte. :)

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