Le bonheur m'a donné rendez-vous

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Je vous écris et tout au loin j'entends le bruit des vagues qui viennent se briser la grève. Un zodiac est de retour. Un seul passager. Une visite aux baleines? J'en doute avec ce vent qui murmure. Cet après-midi, un homme seul en planche à voile serpentait sur le fleuve un peu agité. L'aventure. Je comprends mieux d'où nous vient l'expression prendre le grand large.

Je pense à cette aubergiste d'origine gaspésienne qui a joint sa destinée à un Breton. Il n'y a que les gens de la mer pour en comprendre d'autres. Depuis plus de 15 ans, durant la belle saison, elle ouvre sa maison, affiche son plus beau sourire, pour le bonheur des clients. La table est excellente, le personnel attentionné. Dès que l'on franchit le seuil, les effluves de la cuisine chatouillent nos narines et la salle à manger à elle seule vaut le détour. Le fondant au chocolat, hum! Un pur délice.  À l'Auberge du Grand Fleuve, les amoureux des mots ont de quoi se mettre sous la dent, même sous la couette, les livres sont rois et reines.

Le portrait est idyllique. Cependant, je n'ai pu m'empêcher de penser à ses longs hivers où les glaces figent le temps, que la neige masque les fenêtres, que les passants se font rares et qu'il faut exister. Il y a bien entendu quelques phoques qui viennent se montrer la frimousse, de la rénovation à effectuer, du temps pour rêver, créer. Il arrive parfois que ce ne soit plus assez.

Voilà une semaine que je suis seule. J'ai pris le temps de me déposer, de respirer le grand air marin, d'observer la nature. Chaque soir, le ciel m'offrait un paysage différent. La grève aussi révélait de nouveaux trésors chaque jour. Le bal des mouettes, leurs piaillements en colonie, les rochers qui se dénudent, se polissent par le va-et-vient de la mer.  J'avais oublié à quel point notre fleuve est majestueux et beau. Plus de 3000 kilomètres parcourus en un mois, il est temps de rentrer à maison. Je me souviendrai longtemps qu'à l'été 2012, le bonheur m'a donné rendez-vous.

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