Tout fou !
Qui dit banlieue, pense maison unifamiliale avec son petit lopin de
terre bien clôturé, le BBQ, la tondeuse, l’aménagement paysager printanier, la
cueillette des feuilles automnales, les décorations de Noël lumineuses, le
tempo et... les animaux domestiques.
Je fréquente la gent animale depuis plus de 20 ans, particulièrement la
gent canine. Il y a le bichon maltais de mes voisins qui dès que j’ouvre ma
porte-jardin, semble me dire plein de rage : Qui te rend si hardi de troubler mon breuvage. Il y a ces
promeneurs et leurs chiens que je croise régulièrement lorsque je marche. Au
fil des jours, je constate une confrérie. Petit sac à la main, ils se
rencontrent, discutent, échangent à propos du caractère de leur chien, se
parlent d’actualité. Ils communiquent sous le beau prétexte canin. Je trouve
cela formidable. Pendant ce temps, ceux-ci se chamaillent comme le font les
enfants lorsque leurs parents causent. Parfois, le maître domine le canin, parfois,
le canin domine le maître.
Un jour de février, il y a de cela 30
ans, je suis allée à la SPCA pour adopter un chien. Mon conjoint à cette époque
avait dû faire euthanasier le sien. Il en eut beaucoup de chagrin. Pour
atténuer sa peine et le surprendre, j’ai acheté un chiot à son insu. Tout fou, comme je l’avais surnommé, avait à peine franchi le seuil de la maison
que déjà, il marquait son territoire. Deux heures durant, je travaillais à
limiter les dommages, car il urinait où bon lui semblait. Quand mon conjoint
est arrivé, les choses ne se sont pas déroulées comme je l’avais prévu. La
surprise fut pour moi.
Il n’était pas question de chien, ni
de ce chien. J’ai eu le cœur serré. J’ai bien tenté de le convaincre, de l’attendrir
avec les manifestations joyeuses du chiot, du plaisir que j’avais à avoir un chien
à moi, à nous pour la première fois. Il n’y avait rien à faire, il est demeuré
inflexible. Sa peine était trop présente et la mienne commençait à grandir. Au
lendemain, dans une voiture taxi, j’ai pleuré durant tout le trajet me ramenant
à la SPCA. C’est le cas de le dire, cela sentait le chien mouillé. Tout fou baignait dans mes pleurs et le
manteau de rat musqué, que je portais, accueillait mon déluge lacrymal. J’étais
inconsolable.
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