Le premier party

Enfin ! je suis invitée. J'ai 13 ans et un groupe de ma classe organise une soirée chez Claire, rue Sommerville. Un bungalow de gens bien nantis. En tout cas, beaucoup mieux que moi, fille de prolétaire, résidant en bordure de la voie ferrée. Je n'ai pas encore embrassé un gars. J'ai peur que mes copines rient de moi. Je suis excitée à l'idée de ce premier party et angoissée par la peur de me couvrir de ridicule.

J'ai obtenu l'autorisation de mes parents. Certaines contraintes obligent. Je dois rentrer à 23h30 alors que mes copines ont le droit de rester jusqu'à minuit. Ma mère veut contrôler ma tenue vestimentaire. Je me retrouve avec des vêtements pas trop in. Pas de jeans, pas de maquillage. Aussi bien accepter d'être le vilain petit canard de la soirée plutôt que la rater.

Premier jeu de la soirée: la bouteille. Ce jeu a toujours gardé quelques fondements mais compte de nouvelles nuances que mes fils ont eu plaisir à m'expliquer. La bouteille se met à tourner, je croise les doigts afin qu'elle s'arrête ailleurs que sur moi. Je n'ai aucune envie que mes copines découvrent que je ne suis pas déniaisée. Le sort en fut jeté et... la bouteille s'est immobilisée en ma direction. Paniquée, je suis allée m'enfermer dans les toilettes. Pour me couvrir de ridicule c'était réussi. La peur est très irrationnelle. Après quelques négociations et l'assurance que je ne devrais pas me soumettre au baiser, j'ai accepté de sortir. Je me suis faite petite. Mon calvaire n'était pas fini.

Assise à terre, à proximité des victuailles, Martial s'est approché de moi. J'avoue que j'étais fort surprise qu'un gars veuille me parler après que j'aie fait une folle de moi. Plus il me parlait, plus je m'éloignais. Tant et si bien que je me suis retrouvée sous la table des victuailles sans m'en rendre compte sous le regard amusé de tous. J'étais mortifiée. Martial m'a tiré de ce faux pas en m'invitant à danser. Un vrai cauchemar ! Saurais-je danser ce fameux plain sachant que tous les regards étaient rivés vers nous ?

Finalement, ce fut le plus beau moment du party. D'être dans les bras de ce gars, de respirer les effluves de lavande, m'a apaisée. Je serai toujours reconnaissante à Martial pour ce geste à une étape importante de ma vie d'adolescente. Il a su me donner confiance en moi. Nous nous sommes revus par la suite dans d'autres partys. Il a continué à m'inviter à danser. Je garde en mémoire notre danse sous Let i be.

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