Dimanche des rameaux

Chaque fois qu'elle part en vacances, sa mère est hospitalisée. Cette fois, le scénario se répète. L'amputation de la deuxième jambe est imminente. Opérée d'urgence durant la nuit, elle est en attente de ce coup de fil rassurant qui lui dira que tout va bien. Pendant ce temps, nous partageons notre dîner hebdomadaire.

Inévitablement, nous parlons de sa mère, une femme de la terre, qui lui a annoncé dimanche dernier qu'un dimanche des rameaux venteux est annonciateur d'un mois à venir venteux. Je lui fais le commentaire qu'à l'allure où vont les choses, il n'y aura plus beaucoup de ce savoir, de cette sagesse qui seront transmis aux générations futures car seul les gens de la terre savent observer cette nature. Ils ont surtout appris à lâcher prise.

Elle me parle de son père qui un jour a eu un doigt arraché par une vache trop pressée de courir dans les champs. Pas de clinique, pas de médecin. Un pansement improvisé, car les bêtes, elles, ne savent attendre. Les doigts, les os qui se raboutent pas toujours droits, mais les plaies se referment et la vie continue. Une cicatrice lui rappelle un jour cet incident.

A la ville notre regard heurte rapidement un immeuble, à la campagne notre regard se pose sur l'horizon. De l'espace pour réfléchir tout en étant occupé à diverses activités. Beau temps, mauvais temps, il faut traire les vaches, les nourrir, nettoyer l'enclos, matin et soir. La question de ce que tu vas faire de ta journée, elle est réglée. Tu sais exactement ce que tu vas faire et à quelle heure. Martin Matte dans un spectacle disait: " Les fermiers ne font pas de burn out ". Pourtant, ils sont de plus en plus nombreux à être étrangler financièrement et à en souffrir.

Longtemps, les gens de la terre ont été méprisés par les gens de la ville. Pourtant, ce sont eux les premiers bâtisseurs, les premiers entrepreneurs. Il faut vraiment être débrouillard pour tirer profit de l'exploitation agricole. Ces hommes et ces femmes qui partagent leur quotidien, ont des rapports égalitaires, où chacun sait que l'autre est important. La soeur de mon amie a repris la ferme familiale, a mis au monde une douzaine d'enfants. Chaque enfant a trouvé sa place dans l'entreprise qui s'est diversifiée.

Malgré la mondialisation, nous apprécions nos beaux produits du Québec, nos beaux fromages d'ici. Derrière ce terroir, il y a des hommes, des femmes qui chaque jour, parce qu'ils sont passionnés de la terre, produisent pour nous. De moins en moins d'aînés de famille reprennent le collier. Malheureusement, c'est notre richesse collective qui disparaît sans laisser de traces.

Il y a eu le mercredi des cendres, le dimanche des rameaux et bientôt la résurrection. Ce qui appartient à la terre, retourne à la terre. Joyeuses Pâques à tous nos producteurs d'oeufs, de bovin, de porc, etc.

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