Là, où l'homme va

Nous étions attablées à notre resto habituel, à discuter de tout et de rien, quand notre aînée s'est mise à raconter comment nos grands-mères étaient ignorantes de la chose. Originaire de la Mauricie, infirmière de profession, nous avons appris que lorsque les femmes venaient en consultation gynécologique, elles disaient à leur médecin pour désigner leur vagin: Là, où l'homme va.

J'ai été élevée bien autrement. Ma mère enceinte de ma petite soeur m'a expliqué les choses de la vie. Je savais qu'il existait un vagin et un pénis et que la maman produisait un oeuf chaque mois. Parfois, il était fécondé. Et...le reste, vous le savez. Ma mère m'avait aussi acheté, à l'approche de mes premières menstruations, le livre écrit par Janette Bertrand à ce sujet. Toujours au temps de nos grands-mères, pour signifier qu'elles avaient leurs règles, elles disaient: J'ai vu. Quand elles ne voyaient pas, vous l'aurez deviné, elles portaient une nouvelle vie.

Mon amie infirmière de poursuivre son récit en nous parlant des amérindiennes qui fréquentaient le dispensaire des religieuses. Elles y venaient pour un suivi de grossesse, laquelle était comptée en nombre de lunes. Un jour, alors que les Dames auxiliaires étaient attendues, elle avait opté pour une séance de désinfection. Tout d'abord elle s'était attaquée à l'impétigo. Javel et brosse pour un grand récurrage. Puis, les pous. Vaseline sur le pourtour de la tête, salicylate de méthyle dans les cheveux, un bandeau blanc pour récupérer les cadavres et le tour est joué. Elle a même poussé l'audace, jusqu'à friser les petits amérindiens à la guenille... Notre Denyse nationale devenue une sommité au niveau de la gestion des infections, sait y faire au niveau de la propreté et de la créativité. Nous la prénommons affectueusement notre petit lapin Énergiser.

Le dîner se poursuivant, je parlai de ma grand-mère maternelle d'origine amérindienne. Je racontai qu'une tante m'avait expliqué comment elle et ses soeurs aînées avaient assisté ma grand-mère lors de ses accouchements. Elle m'avait alors dit que le placenta était cuit pour permettre les relevailles. Je vous entends OUACH ! Pourtant c'est ce que font les animaux dans la nature.

Nos enfants, sont bien loin de ces réalités. Le jour où la pilule a fait son entrée, les choses ont changé. Les femmes sont devenues maîtresses de leur corps. L'éducation sexuelle a trouvé place au programme scolaire. La venue d'Internet a permis un nouveau créneau, celui de la porno. Rien à voir avec l'éducation sexuelle. Pendant que mon amie partageait son vécu, je pensais à mon dernier devenu homme, qui même s'il sait où l'homme va, s'interroge tout de même sur les différentes façons de s'y rendre. Je préfère qu'il me consulte plutôt que vous savez quoi, car là, on n'y voit rien.

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