Musique maestro!
Je roulais en direction de son domicile, me faisant la réflexion que notre histoire datait de plus de trente-cinq années. Nous partageons la même passion pour les arts. Ce soir-là, la nouvelle salle symphonique nous attendait. J'avais oublié le programme. Quelle importance! la simple perspective de nourrir mon âme d'artiste en sa compagnie, me réjouissait.
Alors que nous étions attablées au café bistro du Musée d'art Contemporain, elle me fit part d'un rêve. Une jeune fille de 17 ans, découvrant dans un chalet de Lanaudière un 33 tours de Tchaikovsky: le Concerto numéro 1 pour piano. L'interprète, un jeune pianiste venant tout de juste de remporter son premier prix à Moscou. Ce jour-là, émue par cette pièce, elle se jura qu'elle irait entendre ce virtuose.
Quelques années plus tard, alors qu'elle travaillait à New York, elle découvre qu'il se produit à Carnegie Hall. Vous imaginez le prix des billets ainsi que l'Everest qu'elle devra escalader pour assister au concert de ce musicien dont la notoriété fait qu'il joue à guichets fermés. Mon amie a le fort pressentiment que malgré les obstacles qui se dressent sur son chemin, elle assistera à ce concert. De 16 h30 jusqu'à 19 h58, elle fait la file espérant que la chance tournera pour elle. Elle y croit très fort.
Un couple se pointe à 2 minutes du début avec deux billets en main. Elle avait prévu le coup, elle a de l'argent liquide sur elle. Un homme d'affaires français de passage à NewYork, espère la même chose qu'elle. Ils se partagent les deux billets, lesquels sont situés dans une loge. Au programme ce soir-là, le fameux concerto pour piano. Des larmes perlent sur son visage, un rêve de 35 années qui se concrétise. Van Cliburn, est là, il joue pour son grand bonheur.
Samedi soir, Van Cliburn n'était pas là. Il y avait Nagano, tout menu, qui vivait la musique une baguette à la main, la tête avec ses musiciens et le coeur avec Wagner, Liszt et Brahms. Nous étions à la troisième rangée. Quel étrange sentiment que celui de faire corps et âme avec l'orchestre. Une proximité qui m'a profondément remuée. Dès que les violons eurent pris leur envolée dans cette ouverture de Tannhäuser de Wagner, ma peau s'est irisée de la tête aux pieds. Quand vint le tour du pianiste invité, j'ai eu le privilège de voir ses mains caresser les notes, me rappelant soudain la position des mains, la souplesse requise pour jouer tout en nuances. Un réel plaisir pour les yeux et mes oreilles.
Tant et si bien que je me suis dit que la prochaine fois, je choisirais mes billets derrière l'orchestre pour faire corps avec eux. Contrairement à mon amie dont le rêve est devenu réalité, moi, samedi dernier, la réalité m'a fait rêver. Je me suis laissée transporter ailleurs. J'ai voyagé à l'intérieur de moi-même, trouvant là réconfort à une semaine agitée, me rappelant que je suis également musicienne.
Ma très chère amie,
RépondreSupprimerTu as su dire fidèlement mon rêve réalisé, merci. J'en suis émue mais non surprise devant tant de talent. Merci encore. Je t'aime.