J'ai moins peur de vieillir

-
- Cout'donc, quel âge elle a ?

- J'sais pas, peut-être bien 80 ?

- 80 , t'es sûre?

La dame se retourne vers moi en quête d'une approbation. Je le sais-tu, moi quel âge elle a. Je me doute qu'elle a dépassé le cap des soixante-dix ans. Je fais le décompte dans ma tête. Mon père aurait 82 ans, il l'aimait beaucoup, tout comme nos monuments nationaux Félix, Ginette. J'essaie de me situer dans l'échelle du temps avec ses girls, Diane Dufresne, Louise Latraverse ou Forestier, je ne sais plus. Ce que je sais toutefois, c'est que cela fait plus de 30 ans que j'assiste à ses spectacles, que j'y ris, qu'elle m'émeut. Petite, énergique, avec une prose qu'elle seule maîtrise, elle m'épate.
 
Elle apparaît sur la scène, accompagnée de trois musiciens. Piano, guitare et contrebasse. Une toile en guise de fond de scène. Le temps ne semble jamais s'être arrêté sur son corps frêle. La mémoire parfois lui fait défaut, elle en rit et nous rions avec elle. Elle ne se cache pas. Il n'y a pas de faux fuyants, de faire semblant. Je crois bien que c'était pour cela que mon père l'aimait. Chaque fois que j'entends La vie d'factrie, c'est à lui que je pense. Cette chanson me remue le cœur sans que je n'y puisse rien. Toutefois, ma préférée est : Le doux vent d'été. 
 
Quand je vois Clémence, Janette, Denyse Filiatreault, Andrée Lachapelle, Janine Sutto, que j'entends leur éclat de rire, j'ai un peu moins peur de vieillir. Clémence avait une surprise pour nous. Une chanteuse, la chanteuse d'un groupe qui a fait beaucoup de ravage et peu de dommage. Marie-Michèle accompagnait de sa voix chaude les douces mélodies avec de belles harmonies. Deux belles femmes qui nous donnent le goût de vieillir. Après la fin du spectacle, en route vers la maison, mon homme de cœur demande:

-Cout'donc quel âge elle a Marie-Michèle Desrosiers?

- J'sais pas, peut-être bien mon âge?

- T'es sûre qu'elle n'est pas plus jeune ?

- Attend, je vais aller voir sur internet.
 
 

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