Dessine-moi la vie

Sa petite main bien calée dans la mienne, nous descendons vers le stationnement. Elle me cause, sautille sur les roches, glisse un peu. Je la retiens. Depuis plus de deux heures nous faisons route ensemble. Je lui dis qu'elle est comme une gazelle, qu'il faut bien prendre le temps de poser le talon dans la descente. Elle veut que l'équipe des bleus soit celle qui arrive en premier. Nous sommes avec son père, son grand-père et sa petite soeur.

Elle sait que nous faisons équipe, car elle parle de l'équipe des filles, des bâtons bleus, fait le compte du nombre par équipe. Nous ralentissons un peu, la fatigue étant. Elle dit qu'elle perdure. Joli terme pour dire qu'elle perd et trouve cela dur. Nous avons une compagne de voyage dont elle me confie la garde. Reprenant sa menotte, la compagne se joint à nos mains. Pas dans cette main me dit-elle? Elle veille sur sa compagne comme on veille sur un précieux trésor, une feuille cueillie durant la montée.

Quand ce n'était pas ma gazelle, c'était l'aînée qui me serrait la main. Tour à tour, les adultes présents accompagnaient trois belles princesses au sommet de la montagne. Trois petites confiantes, ouvertes, curieuses, qui s'inventaient des jeux. Tant à la plage que dans les bois, elles m'ont ramenée sur les rives de l'enfance jouant à accueillir un minou, utilisant trois luminaires aux allures de baguette magique pour alimenter leur imaginaire, dessinant dans le sable, s'extasiant devant une chenille. Un pur bonheur.

Hier en fin de journée, après la petite excursion en canot, elles étaient un peu crevées. Pendant que leur grand-mère s'affairait à couper les légumes, je dessinais pour l'aînée et ma gazelle.  Ma gazelle voulait que je la dessine avec papa m'indiquant ce qu'elle voulait comme vêtement pour elle, pour son père, insistant pour les chaussures de ballerine. L'aînée en fit de même, mais pour elle et sa mère. Mes talents de dessinatrice avaient peu d'importance. Ce qui était touchant, c'était l'amour de ces deux petites pour leurs parents.

La nuit tombante, l'aînée s'est écroulée de sommeil à peine le repas avalé. La cadette s'est fait cajoler sur les genoux de sa grand-mère pour aller rejoindre Morphée. Je me suis allongée aux côtés de ma gazelle qui était plus agitée. Sa belle tuque turquoise déposée sur une chevelure dont elle a eu le toupet de se couper, elle brandissait sa baguette magique, écoutant la conversation des grands autour du feu. Elle mit un peu de temps avant de sombrer.

La chaleur de ce petit corps abandonné m'a invitée à prolonger mon bonheur. J'ai partagé le gîte avec ces trois princesses, leur tante et leur papa dont l'enfance a été complice avec mon aîné. Je me suis trouvée privilégiée même si la nuit était humide, que nous étions à l'étroit et que le sommeil était fragile.  Dans mon coeur, il y avait toute la chaleur désirée. Mes belles princesses vous êtes des fées!

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